L’homme médiéval & l’homme connecté face à la résurrection du Christ

24 avril 2020

Dimanche 26 avril 2020
3e dimanche du Temps Pascal

Dans son ouvrage intitulé « Résurrection, mode d’emploi », Fabrice Hadjadj, philosophe et essayiste, pose un regard neuf et plein de finesse sur le mystère du Christ Ressuscité. Il compare avec mordant la manière dont la résurrection était perçue par un paysan du Moyen-Age avec celle de l’homme d’aujourd’hui. (Source : www.aleteia.org du 22 avril 2020.)

« On dénonce volontiers l’obscurantisme du Moyen Âge, mais c’est pour se consoler du faux jour de notre âge médiatique. L’homme médiéval était beaucoup plus positif que le citoyen multimédia. Il construisait sa maison, cousait ses vêtements, travaillait le sol, y enterrait un certain nombre de ses enfants, croisait fréquemment des lépreux, dansait avec tout le village autour du grand feu de la Saint-Jean, se découvrait devant une statue de la Vierge, tuait le cochon, s’armait d’une faux ou d’une pique pour recevoir le collecteur d’impôts. Un rude gaillard, à qui on n’en conte pas. Il avait peut-être tort de croire que la terre était plate, mais il n’en était que plus proche, la défrichant, la binant, l’ameublissant, l’ensemençant, tandis que notre vision d’une planète ronde et bleue adopte le point de vue imaginaire d’un astronaute flottant au milieu de nulle part pour qui le blé ne pousse ni ne mûrit mais apparaît directement en tranches extra-moelleuses sous emballage plastique. Et il était peut-être dans l’erreur de penser que le soleil tournait autour de cette galette terrestre, mais il en faisait la mesure vive de ses heures, plus longues en été, plus courtes en hiver, et il savait aussi les bienfaits de la pluie, tandis que pour nous autres, touristes, la pluie n’est que le mauvais temps, et nos heures, ramenées à des horaires, se chiffrent sur le chronomètre de Taylor.

Alors, forcément, l’événement d’un Ressuscité paraît difficile à avaler pour un habitué des avatars, des profils, des objets 3D qui ne sont ni nés ni morts ni vivants. Mais pour un gars positif et manuel d’autrefois, un paysan, un meunier, un mégissier, c’était de l’invraisemblable, sans doute, et cependant à peine entendait-il  : « Amen, amen, je vous le dis  : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul  ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jn 12, 24), ça devenait simple, c’était aussi vrai qu’avril, le renouveau de la verdure, l’or des moissons… »